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Avignon. Recenzja Liberation z Aniołów Warlikowskiego

W dzisiejszym (18 lipca) wydaniu Liberation ukazała się entuzjastyczna recenzja "Aniołów w Ameryce" w reż. Krzysztofa Warlikowskiego. Autor zauważa m.in, że rolę rabina granego w Warszawie przez Stanisławę Celińską w Avignonie zagrała Maja Komorowska, związana niegdyś z Jerzym Grotowskim.

Toujours la meme pulsation, comme un coeur qui ne cesserait de battre tout au long du spectacle, memes notes assourdies que dans Purifiés de Sarah Kane et Kroum l'ectoplasme de Hanoch Levin, précédentes productions du metteur en scene polonais présentées au festival d'Avignon. Le théâtre de Krzysztof Warlikowski, c'est d'abord cela, ce battement mélodieux qui semble se poursuivre meme lorsque la musique se tait; une voix intérieure qui résonne durant les presque six heures que dure l'intégrale d' Angels in America, la piece de l'Américain Tony Kushner présentée, en polonais surtitré, dans la cour du lycée Saint-Joseph.

Rabbin au micro. Les anges du titre sont bien la, pas les créatures divines dotées d'ailes et d'auréoles, mais les invisibles, qui veillent sur cette soirée, en suspendent le temps, l'accompagnent de leur souffle, sans que rien n'apparaisse jamais forcé. Premiere scene: un cercueil et un vieux rabbin au micro, qui rend hommage la défunte, grand-mere de Max, Mark, Louis, Lisa, Marie. Euh [.] Lesley, Angela, Luke et Eric ; c'est un nom juif, ça ? Eric ? Eric ! [.] Cette femme, je ne la connaissais pas [.] Vous savez, l'hospice du Bronx pour vieux Israélites, il y en a beaucoup comme elle [.]. Le vieil homme s' échauffe, défend ceux qui, comme elle, se sont battus pour la famille, pour une vie juive, pour que vous ne grandissiez pas ici, dans ce pays étrange, dans ce melting pot ou rien ne se mélange. [.] L'Amérique n'existe pas. L'argile dont vous etes faits, c'est l'argile d'un shtetl lituanien [.]. Elle était, conclut-il, le dernier des Mohicans. Tout est la: la mort et le rire, Dieu et la famille, l'ancien et le nouveau, le déni du réel et la poésie. Et l'empathie pour des personnages qu'on aime parce que les acteurs les aiment.

Le programme indique que c'est une comédienne qui interprete le vieux rabbin. Maja Komorowska, dont c'est peu pres la seule intervention, passe le reste de la représentation assise sur une chaise au premier rang. Pour de rares spectateurs, son nom n'est pas inconnu: elle fut l'une des actrices de Grotowski. Encore un ange invisible. Le plateau est bordé de panneaux miroitants, et c'est comme si les images se dissolvaient sur les bords. Le décor, ce sont d'abord les fauteuils. Moches et de toutes sortes - salons, salles d'attente, bureaux -, ils accueillent une action qui emprunte souvent l'art de la conversation. Et ils sont moins conçus comme des accessoires que comme des lieux de vie ; ce qui est aussi le cas des lits d'hôpital ou se déroule une partie des événements. Angels in America raconte le sida, les années Reagan et le millénaire finissant dans un New York ou, quinze ans avant le 11 Septembre, tout est déja sous le signe de l'angoisse et de la catastrophe.

Droite chrétienne. Au coeur de la piece, un héros américain qui a vraiment existé. Jeune avocat, Roy Cohn fut le protégé et le bras droit du sénateur Mc Carthy dans sa croisade anti-communiste; adjoint du procureur qui envoya a la chaise électrique le couple Julius et Ethel Rosenberg, accusés d'espionnage au profit de l'URSS, il fut, enfin, l'un des piliers de l'Association de défense de la famille américaine, principal lobby de la droite chrétienne. Réactionnaire, raciste, homophobe, l'avocat niera presque jusqu'au bout son homosexualité notoire et fut, en 1986, l'une des premires victimes emblématiques du sida. Dans la piece, Kushner l'imagine face a son médecin, qui lui révele la maladie: - Les homosexuels sont des hommes qui ne connaissent personne et que personne ne connaît. Qui pesent zéro. C'est moi, ça ? [.] Roy Cohn n'est pas un homosexuel. Roy Cohn est un hétérosexuel qui s'envoie en l'air avec des mecs.

De Cohn, Kushner fait un révélateur: a travers lui, le sida touche au coeur du systeme - la peur devant l'effondrement des systemes de défense - et la fantaisie gay, surtitre de la piece lors de sa parution en 1991, se transforme en fable apocalyptique. Joyeuse, pourtant. Sur la scene du lycée Saint-Joseph, aucun acteur jamais ne s'apitoie sur son personnage. Et surtout pas Andrzej Chyra, qui joue un Roy Cohn parfait salaud jusqu'au bout face au fantôme d'Ethel Rosenberg (Danuta Stenka), qui n'aura sa vengeance qu' l'issue d'un kaddish -priere des morts- conclu sur un retentissant fils de pute !.

Kushner, le Juif athée, ne recule pas devant le blaspheme. Mais il n'est pas insensible au religieux. Tout en s'amusant brouiller les pistes, Joe (Maciej Stuhr), le jeune avocat la fois mormon, républicain et homosexuel, est mariée a Harper (Magdalena Poplawska), qui se bourre de valium entre deux hallucinations. Deuxieme couple: Louis l'employé (Jacek Poniedzialek) et Prior (Tomasz Tyndyk), son compagnon déja tres malade. Autre membre important de la communauté : Belize (Rafal Mackowiak), travesti noir et aide-soignant a l'hôpital.

Rivieres lumineuses. La piece va et vient des appartements des uns et des autres l'hôpital, en passant par le bureau de Roy Cohn et Central Park, côté drague. La mise en scene de Warlikowski accentue cette fluidité, certaines scenes se déroulant en presque simultané. L'histoire regorge de situations fantastiques - reves, visions, personnages improbables -, mais l'atmosphere du plateau reste sereine. Louis peut bien s'écrier sur les marches du tribunal de Brooklyn, ou il travaille: Tu es terrifié. Moi aussi. Tout le monde est terrifié sur la terre de la liberté. Dieu nous garde tous!, aucun bruit de sirene ne vient déchirer le silence. Et la ville elle-meme n'apparaît que fugitivement, a travers des images projetées de phares de voitures, comme des rivieres lumineuses entre les buildings. Rien n'est surjoué, meme si certains personnages (la Mere, ou meme l'Ange) semblent plus anecdotiques.

Surtout, meme inextricables, les situations sont toujours ouvertes plusieurs interprétations, travaillées par un doute qui maintient sans cesse l'attention. Warlikowski s'en explique : Mon travail consiste toujours a privilégier le texte plus que les situations, en m'appuyant sur la présence des acteurs et de leur corps. J'essaie de trouver les moyens que le théâtre nous offre pour éviter le réalisme, tout en faisant comprendre les enjeux des situations. Il y a des images dont la violence est plus grande que la pratique effective de celles-ci. C'est la force du théâtre.

Il va sans dire enfin que ce n'est pas tout a fait par hasard si Warlikowski le Polonais monte en 2007 une piece ou l'homophobie, l'antisémitisme et le conservatisme religieux sont des sujets majeurs. Ses six heures de reve ne sont pas un bel objet mais un fer rouge au cur de la réalité de son pays.

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